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mardi 25 février 2014

Aymeric Patricot. «Les petits Blancs»

     
                             
 
 
Isolés dans une société plus multi-ethnique que jamais, abandonnés par ceux qui réussissent, les « petits Blancs » constituent l'angle mort de la sociologie française, selon Aymeric Patricot. Son livre nous plonge dans l'enfer ordinaire du quart-monde.

Pas de futur et encore moins de présent...

 Quel a été le point de départ de ce livre ?
J'enseigne depuis dix ans en ZEP (zone d'éducation prioritaire), dans la région parisienne, et je suis au contact de la réalité du métissage.
J'y ai constaté le décalage entre l'omniprésence des questions ethniques, des différences d'origine et de couleur de peau parmi mes élèves et le mutisme médiatique sur ce thème. Issu d'une ville normande pas du tout métissée, je me suis découvert blanc dans un environnement où, étant minoritaire, ma couleur de peau avait une importance.
 En France, on refuse de parler de ce sujet.
 Comparativement, et même si l'expression de « white trash » est parfois méprisante, ce n'est pas un non-dit aux États-Unis.

Qui est ce petit Blanc dont vous parlez ?
C'est un Blanc pauvre.

 La pauvreté économique est évidemment essentielle ici mais avec cette particularité que la misère et les comportements qu'elle engendre n'ont pas l'« excuse » de l'esclavage ou de la discrimination.
S'il est pauvre, c'est de sa faute et il n'a pas le droit de se plaindre.
S'y ajoute, aujourd'hui, une fracture chez les Blancs, entre ceux qui s'en sortent et ceux que la mondialisation n'aide pas, qui se sentent abandonnés.
 Leur ressentiment est économique, plus à l'égard des bobos que d'une minorité ethnique.
 Ils en souffrent d'autant plus que les gens à l'abri les considèrent comme des beaufs racistes, alors que ce sont eux qui vivent le métissage de près.

Comment ce sujet ultrasensible est-il accueilli ?
J'avais peur d'être récupéré par l'extrême droite, même si mon propos, nourri par une enquête de terrain, est modéré, pas du tout politique, l'idée étant de cerner des faits et de souligner une nouvelle réalité dans notre pays.
Voici trente ans, je ne me serais pas caractérisé comme Blanc mais c'est ainsi, la société se diversifie.
 Je ne pense pourtant pas que le racisme se développe en France.
C'est la diversité qui augmente et donc les questions qu'elle pose qui se multiplient.

Certains propos, cependant, sont terribles...
Des paroles dures, haineuses, sont prononcées mais le plus troublant est d'entendre le discours de gens modérés qui se sentent mal parce qu'ils n'ont pas le droit d'exprimer leur souffrance.
J'ai rencontré des paysans pauvres qui m'ont dit : « Nous, on ne brûle pas de voitures, on ne nous écoute pas ».
 La misère s'approfondit dans notre pays et la classe politique n'en a pas conscience : l'augmentation des SDF, dont de plus en plus de femmes, les problèmes de fin de droit, l'usage de la drogue dans les campagnes, l'isolement ethnique en sont des signes.

Comment expliquez-vous cette indifférence politique ?
Le petit Blanc est ce que j'appelle un angle mort de la sociologie.
 Il n'intéresse pas la gauche parce qu'il est blanc et pas la droite parce qu'il est pauvre, il n'entre pas dans les bonnes cases.
Le Parti socialiste s'est coupé de ces classes populaires.
 Le vrai danger n'est pas que ces personnes votent pour le Front national mais qu'elles ne votent plus.
 Car il y a de la résignation.
Pour eux, la révolution n'est pas pour demain matin, ni la semaine prochaine.
Une chanson des Clash, « White riot », parle bien de cela et évoque ces Blancs qui aimeraient se révolter comme les Noirs mais sont paralysés par l'apathie.

Ce livre a-t-il été reçu comme une provocation ?
Non, je n'ai pas fait un pamphlet, j'ai voulu montrer quelque chose qui n'a pas été dit.
 Ceux qui se sentent choqués refusent de voir la réalité.
 Beaucoup de gens m'ont remercié parce qu'ils se retrouvaient dans l'ouvrage.
J'ai eu des réactions de gens du Maghreb qui, même si je ne parle pas directement d'eux, ont apprécié ma manière bienveillante d'évoquer les classes populaires.

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1 commentaire:

  1. J'ai connu cette situation, l'apathie c'est dans cet état que l'on tombe rapidement! trop pudique, pas la culture de se faire entendre violemment, pas les moyens de se regrouper... les polituiques comptent tout en millions, milliards de ce que ça coûte ou rapport à l'Etat dès qu'ils font quelque chose, mais pour la personne dans le besoin, ce qu'elle veut, c'est être considérée individuellement! tant de millions pour l'Etat ne lui rapporteront peut-être qu'un 1 centime à elle, ce qui est complètement décalé! Les petits Blancs n'ont pas de rancoeur pour les autres ethnies, dans leur relation, ils veulent un respect réciproque! mais là, F.H. fait tout justement en ressortant l'honneur de l'islam pour casser cette relation! Le petit Blanc est déconsidéré par les politiques parce qu'il ne fait pas de bruit (résigné), il vivote dans son coin sans rien demander!

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